Le temple de
Cormeray
Après bien des réclamations des
protestants, pour obtenir l'autorisation de se réunir pour un plein
exercice de leur culte, le roi accepta le fait qu'il n'y avait plus de
culte pour le baillage et que les accords en stipulaient un.
Par un arrêt du Conseil d'Etat du 12
septembre 1626, le roi autorise les réformés à se recueillir au village de
Cormeray.
Cet arrêt permet aux réformés "de
faire l'exercice de leur religion en ce lieu de Cormeray, distant d'une
lieue ou environ de la ville, et de construire au dit lieu un temple pour
le dit exercice à leurs frais et despens".
Gabriel d'Hauteville, seigneur de
Cormeray et époux d'Elisabeth de Corbet, offre un terrain sur sa propriété
de Cormeray. Nombre de personnages de l'aristocratie de l'Avranchin se
rassemblèrent autour de Gabriel de Montgomery pour prendre possession des
lieux.
La cérémonie pour la première
prédication eut lieu le 12 août 1627, sous la présidence du pasteur
Philiponneau Antoine, écuyer sieur de la Fleuralgier et époux de Judith d'Hauteville,
fille du seigneur du lieu. Il restera en poste jusqu'en 1637.
A ses origines, Cormeray fut une
église de droit de fief s'élevant sur un terrain qui appartenait au
seigneur du lieu, elle était pour ainsi dire sa propriété. Afin de la
maintenir, il fut insinué que l'exercice de droit fief fut converti en
droit réel, par usurpation au profit de la communauté. Elle devint ainsi
une église d'exercice de droit réel.
Cormeray devenait l'une des onze
églises du colloque du Cotentin. Au temple, le pasteur célèbre d'ordinaire
au moins trois services par semaine ; le principal, le dimanche matin, à 9
ou 10 heures ; le second à trois heures de l'après-midi ; le troisième, le
jeudi.
Pour la subsistance et l'entretien du
temple, Gabriel de Montgomery donna une rente de trois cents livres ;
Jacques Dalibert, notable de Pontorson, en offrit une de 150 livres. Le
prêche parvint à posséder 584 livres de rente.
Pendant trente cinq ans le culte
s'exerça à Cormeray.
Le 3 juillet 1662,les portes du
prêche furent forcées et le feu fut mis au temple dans la nuit du 26 au 27
novembre de la même année. L'un des principaux instigateurs de ces
manifestations était Olivier Bence, vicaire à Cormeray, accusé d'avoir,
nuitamment et par effraction, volé les meubles et l'argent des
protestants, d'avoir effondré et brûlé leur temple.
Le temple fut reconstruit et en 1669,
le synode de Normandie alloua 280 livres aux réformés de Pontorson pour
l'incendie de leur temple, et 100 livres au ministre Derodon.
Mais l'édifice spirituel se
désagrégeait, les abjurations se multiplient, des temples sont fermés, des
pasteurs bannis et exilés, tout annonce la révocation de l'Edit de Nantes
qui allait voir la fin de ce prêche qui fut démoli en 1685.
"En 1685, le prêche fut démoli par
un de la Champagne, lieutenant au baillage d'Avranches, en vertu des
ordres du roi, et les matériaux en furent adjugés aux frères de la Charité
de Pontorson."
Le coup fut dur pour les protestant
de Pontorson, il y eut des obstinés qui, après la destruction du temple,
se rendirent pour leurs dévotions au temple de Cleunay à Rennes qui allait
à son tour subir le même sort que celui de Cormeray.
Persécutés les protestants
s'enfuirent à l'étranger, leurs biens furent confisqués, de ces biens ont
fit une prime à la conversion. Certains consentirent à une abjuration de
dernière heure
Les registres de l'état religieux de
ce temple ne nous sont pas parvenu.
Conséquences de la révocation de
l'édit de Nantes :
Dans un mémoire adressé en 1689 à Louvois, Vauban évalua les pertes
causées par la révocation :
- La désertion de 80 ou 100 000 personnes de toutes conditions sorties
du royaume, qui ont emporté avec elles plus
de 30 000 000 de livres de l'argent le plus comptant ;
- la fuite de nos arts et manufactures particulières, la plupart inconnues
aux étrangers, qui attiraient en France un argent très considérable de
toutes les contrées de l'Europe ;
- la ruine de la plus considérable partie du commerce ;
- le renforcement des équipes des flottes ennemies par 8 à
9 000 matelots des meilleurs du royaume ;
- le renforcement des armées des pays adversaires par 5 à 600 officiers et
10 à 12 000 soldats beaucoup plus aguerris que les leurs, comme ils ne
l'ont que trop fait voir dans les occasions qui se sont présentées de
s'employer contre nous.