L'évêché de Dol et ses relations avec Tours
NOMINOE ET L'EGLISE
Dés 753 Pépin le Bref entreprend une
expédition en Armorique et crée la marche de Bretagne, mais de
nombreuses insurrections ont lieu. Son fils, Charlemagne, décide une
nouvelle offensive en 811 et s'efforce de susciter dans l'Eglise un
courant favorable à la cause impériale. A sa mort Louis le Pieux, pour
calmer les révoltes qui continuent, veut s'appuyer sur des hommes sûrs,
bretons de race. Il favorise un Comte : Nominoë,
Celui-ci lui restera lui fidèle jusqu 'en 840 mais à
l'avènement de Charles le Chauve, fils de Louis, il reprend les armes et
lui infligera une sévère défaite à Ballon, étendant le territoire breton
jusqu 'à Angers. Il est à noter qu 'à cette époque on est vassal d'un
homme et non pas d'un titre.
Nominoë, chef des Bretons (il n'est pas Roi, plutôt Duc, mais
néanmoins couronné par l'Archevêque de Dol ) affirme sa puissance qu'il
veut non seulement temporelle mais aussi spirituelle. Estimant que la
Bretagne ne pourra être indépendante si les autorités ecclésiastiques
franques gardent la main sur le clergé breton, en 849 il accuse de
Simonie (trafic à prix d'argent des choses saintes) 4 Evêques : Salacon,
Susan, Félix, Gernobrius (Dol, Vannes, Quimper et Saint-Pol-de-Léon )
nommés par le Roi de France. Seul celui d'Aleth n'est pas accusé, il est
breton, et Rennes et Nantes sont sous la tutelle franque après les
accords de Ballon. Il les remplace par Retwalotron, Courantgen, Anaweten
et Cloilaion. Les Evêques accusés et reconnus coupables se réfugient en
France. Les nouveaux Evêques ne seront, bien sur, pas reconnus par
Tours.
Nominoë a crée sa métropole ecclésiastique : Dol, Archevêché
(Il faut être au moins Archevêque pour couronner un Roi )
Les raisons de choisir Dol :
Cathédrale existante, crée par Saint Samson, le plus populaire et le
restaurateur de la Domnonée. Dol est proche du Mont-Dol, haut lieu des
religions pré celtiques, celtiques, et romaines, lieu des batailles des
forces de lumière et de ténèbres, Dol est un centre de pèlerinage.
Dés lors L'Église de DOL et l'Église de TOURS vont
s'affronter pendant plusieurs siècles
Nominoë va aussi affirmer sa puissance en favorisant en 842
la création par Convoïon, archidiacre de Vannes de l'abbaye bénédictine
de Redon.
Ses successeurs vont continuer la même politique
d'indépendance vis à vis des carolingiens et de l'autorité spirituelle
de Tours :
En 851 victoire d'Eripsoë au Grand-Fougeray sur Charles le
Chauve
En 857 Salomon est prince de toute la Bretagne et d'une
partie de la Gaule, il réclame le Pallium pour Dol, ce que refuse le
Pape Nicolas 1er. (Pallium : bande de laine blanche marquée de croix
noires que le Pape, les Primats et les Archevêques portent sur la
chasuble en sautoir)
Les Evêques bretons sont invités à un nouveau concile, mais
ils déclarent ne reconnaître que l'Archevêque de Dol.
Puis vinrent à la fin du IXéme siècle les invasions normandes,
seigneurs évêques et moines se regroupent pour fuir vers le pays Franc ou
l'Angleterre.
Les reliques sont précieusement emportées et vont avoir des
destinations diverses : Saint Corentin à Marmoutier prés de Tours,
Saint Samson à Saint-Sainphorien d'Orléans et Saint Magloire à Paris.
Certaines trouvèrent refuge en Angleterre, mais beaucoup d'autres furent
perdues à jamais.
LA BRETAGNE NORMANDE
Les puissants laïcs et le clergé étant partis "
seuls les pauvres Bretons cultivant la terre restèrent sous la
domination des Barbares, sans guides et sans soutiens " (chronique
de Nantes ) Ils se réfugièrent dans les forêts, beaucoup furent
déportés, vendus comme esclaves. Quelques uns se soulevèrent, mais la
répression fut sévère !
Enfin, en 936, Alain Barbetorte, petit-fils d'Alain le
Grand, débarque à Cancale. Il mettra trois ans pour chasser
l'envahisseur du sol breton.
LA BRETAGNE BRETONNE
Les églises sont en ruines, les abbayes dévastées, les
prêtres partis, la religion en veille, les anciennes croyances celtes
ont ressurgie. Les seigneurs vont lutter pour prendre le pouvoir, le
clergé a tout à refaire, à reconstruire et aura au seuil de ce nouveau
millénaire une importance capitale, tant matérielle que spirituelle sur
l'avenir de la Bretagne.
LE CONFLIT ENTRE DOL ET TOURS
Nominoë ne
se doutait pas que, par son action, il déclenchait une « guerre
religieuse » entre ces deux métropoles et qui allait durer 8 siècles, ne
se terminant qu'en 1604.
Après
une trêve due aux normands, tout va recommencer avec Wicohen,
Archevêque de Dol en 988. Son fils Junkeneus (ou Ginguené)
lui succède (les seigneurs Evêques n'étaient alors
pas astreints au célibat, mais en 1075, Juhel sera
excommunié par le pape Grégoire VII pour s'être
marié publiquement ; d'ailleurs après 35 ans de racket il
sera chassé par les Dolois)
L'Evêque
de Dol a également une puissance temporelle ; il est Comte de
Dol et doit l'ost ducal (10 chevaliers parmi ceux de Junkeneus :
Landal, Beaufort, Combourg, du Guesclin.) Il est à l'origine de
la seigneurie de Combourg qu'il donne à son frère
Rivallon 1er.
C'est
en 1076 que le pape reconnaît officiellement «
l'Archevêché » de Dol en accordant le pallium
à Even, le nouvel Archevêque ; Mais en 1084 le nouveau
pape Urbain II déclare « Tout l'épiscopat doit
soumission à Tours », néanmoins il accorde
(provisoirement) le pallium à l'Evêque Rolland en 1093.
1195 Au concile de Clermont, Dol et Tours sont toujours en
conflit, Tours étant soutenu par le roi de France
1199 Le pape Innocent III donne sa sentence : Dol doit
soumission à Tours.
1221 Bulle du 12 mai à l'issue de laquelle l'Evêque de Dol
Jean de la Mouche se rend à Tours se faire consacrer par l'Archevêque
Barthélemy
On pourrait penser que tout est fini... .Mais c'est sans
compter sur le caractère breton.
Deux siècles s'écoulent ; les Bretons sont pendant la guerre
de succession pris entre France et Angleterre, et les prélats se
rapprochent de Tours ou Dol, suivant les alliances. A la fin de celle-ci
tout semble rentrer dans l'ordre papal.
Mais....
Le
25 mai 1400 Monseigneur Hamelin, Archevêque de Tours se rend
à Dol et, oh surprise, voit les portes se fermer. Richard de
Lesmenez (Emeri pour Robidou), Evêque de Dol, lui crie par-dessus
les murs qu'il le tient pour un usurpateur. Enfin les portent
s'ouvrent.... Mais la foule chasse le cortège à coup
d'épées et de bâtons et Hamelin s'enfuit. Emeri
défend aux curés du diocèse de recevoir Hamelin.
1450 le 16 novembre, au couvent des Cordeliers à Dinan, Jean,
Archevêque de Tours, et Raoul de la Moussaye, Evêque de Dol établissent
un accord l'Archevêque de Tours visitera le diocèse de Dol une fois
pendant son sacre, : mais dans la doyenné de Bobital (dénommée
quelquefois Bobital-en-France, Bobital était alors la doyenné mais le
siège de celle ci était à Saint-Carné)) et y recevra soixante pièces d'or
; néanmoins cet accord demeura lettre morte ;
1451 le 14 mars : nouvelle conférence à Tours
1452 le 20 janvier (ou le 1er février 1453 pour Guillotin
de Corson) le pape Nicolas V ratifie cet accord (il semble que de
telles visites n'eurent jamais lieu)
1493 Le pape Alexandre VI accorde à Thomas James et à ses
successeurs le droit de se faire précéder de la Croix dans son diocèse
comme permis aux Archevêques. Les successeurs de Thomas James se
pareront du titre d'archevêques
1524 Querelle entre le Pape Clément VII et le Roi de France
François 1er :Le Pape nomme Jean de Staffilo à Dol, le Roi refuse. Il
n'y aura pas d'Evêque à Dol jusqu'en 1528 ! François de Laval, fils
naturel de Guy XVI de Laval et d'Anne d'Espinay y sera légitimé en 1529
par le Roi
1591 Mort de l'Evêque Charles d'Espinay ; Ce n'est qu'en 1598
qu'Edmont de Revol sera nommé par Henri IV, mais jamais sacré.
Le dernier Evêque sera Mgr Urbain René de Hercé, fusillé à
Vannes par les Bleus le 27 juillet 1795 après le débarquement de
Quiberon
R. Aulagnier, mars 2002
BIBLIOGRAPHIE
-
Histoire de
Bretagne de Henri Poisson et J.P Lemat
-
Dol de Bretagne d'hier et d'aujourd'hui de Patrick
Amiot
-
Dol de Bretagne, regard à travers son Evêché de
P.Amiot
-
Toute l'histoire de Bretagne de J.J.Monnier et J.Ch.Cassard (
Edition Skol-Vreizh )
-
Nominoë et l'épopée des rois bretons d'Hervé le Boterf
-
Sanctuaires croix et fontaines de M.Monier

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